Comment produire un Jeu de Société RSE comme outil de sensibilisation ? Guide Pratique du serious game pour les entreprises
Le marché des jeux de société est en plein essor et les préoccupations environnementales de plus en plus importantes pour les consommateurs. Produire un jeu de société RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) est une opportunité pour les éditeurs de se démarquer tout en répondant aux attentes croissantes en matière de durabilité. Sur base d’un exemple concret (le jeu français Graines d’Espoir), cet article explore les étapes clés pour concevoir et produire un jeu de société en respectant les principes RSE, de l’idée initiale à la distribution finale.
🃏 Exemple de jeu à découvrir :
Graines d’Espoir, cas concret de développement d’un jeu écoresponsable
Conception de la mécanique d’un jeu RSE pour une entreprise
Co-construire un serious game avec des experts du développement durable
Impliquer des experts dès la phase de conception permet de garantir que le jeu de société RSE soit pertinent et convaincant. Par exemple, le jeu de société écologique Graines d’Espoir a été pensé en ce sens, construit par une équipe experte en ingénierie des transitions, RSE/RSO, stratégie climat et bas carbone, etc. Chacun a apporté ses compétences dans un domaine particulier (agronomie, numérique responsable, écosystèmes marins…) pour rendre le jeu plus complet.
Intégrer les valeurs RSE dans le gameplay
Pour produire un jeu de société RSE, il est essentiel que la mécanique ludique reflète les principes de durabilité et de coopération. « On peut par exemple citer In Extremis, de l’éditeur Jeux Opla, dont la trame du gameplay s’appuie sur les enjeux de transition écologique. Bioviva, Blam et Subverti sont encore d’autres exemples d’éditeurs vertueux. Et bien sûr Entre Deux Chaises, éditeur de jeux écologiques ! », explique Julien Griffon, concepteur de jeux en sein de cette dernière maison d’édition de jeux écoresponsables.
Le jeu Graines d’Espoir, quant à lui, apporte un éclairage nouveau sur nos pratiques en matière de RSE. Afin de mieux cerner l’importance de chaque action, chaque carte porte un nombre de petite.s graine.s (🌱), permettant de quantifier la portée de l’impact environnemental (positif). « Dans ce jeu qui peut s’inscrire dans une démarche RSE, vous récoltez les fruits de vos bonnes actions faites pour l’environnement. En effet, dès que vous effectuez une action écrite sur le recto d’une carte, vous pouvez alors retourner ladite carte et découvrir ce qu’elle a à vous révéler au verso », explique Antonin, concepteur de jeux de société et notamment co-concepteur de Graines d’Espoir, avant d’ajouter : « cette mécanique de récompense est globalement motivante et offre la possibilité de voir l’écologie comme un jeu, sérieux certes, un serious game finalement, mais bel et bien une activité ludique loin du côté punitif que certains perçoivent. »
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Design graphique et matériaux durables du jeu de sensibilisation
Collaborer avec un illustrateur éthique pour répondre aux enjeux RSE
L’esthétique du jeu doit refléter les engagements RSE de l’éditeur. Travailler avec des illustrateurs et des infographistes sensibilisés aux enjeux environnementaux assure une cohérence entre le message du jeu et son apparence visuelle.
Ces illustrateurs de jeux pourront par exemple opter pour un style graphique minimaliste utilisant la bichromie et l’absence de grands aplats de couleur. «On peut aussi utiliser des petites techniques comme les polices d’écriture de type Ecofont. Les lettres sont pleines de petits trous blancs, ce qui permet d’économiser un peu d’encre sans que ça soit dérangeant visuellement», ajoute le spécialiste de la création de jeux Antonin.
🔭 Voir plus loin :
Sofiia Yatsiuk & Flavien Nicolas, illustrateurs, détaillent ici leur manière d’éco-concevoir l’esthétique du jeu de société écologique Graines d’Espoir.
Réduire le matériel nécessaire et choisir des matériaux durables
Les matériaux utilisés pour produire un jeu de société ont un impact significatif sur son empreinte carbone. Par exemple, la production de carton recyclé émet environ 2,5 tonnes de CO2 par tonne, tandis que celle du plastique peut atteindre 6 tonnes de CO2 pour la même quantité de matière, selon European Environment Agency.
« L’UEJ (ndlr : Union des Éditeurs de Jeux) a d’ailleurs publié un livre blanc de l’écoconception des jeux à destination des éditeurs », explique Julien Griffon. « Pour notre jeu de dessins Street of Tokyo, il nous fallait des feutres effaçables, car l’objectif est de dessiner sur des plans de la capitale nippone. Pourtant, nous avons décidé de ne pas en mettre pour des raisons écologiques (leur durée de vie est courte) et aussi parce qu’ils coûtent excessivement cher. À la place, nous favorisons l’utilisation de crayons gras à base d’huile, par exemple les Woody de Stabilo, qu’on peut utiliser très longtemps et pour d’autres jeux. C’est dans le même esprit que les jeux électroniques qui sont fournis sans les piles et ça ne choque plus personne ! ».
Constat partagé par Joeffrey Costa, CEO d’Essentials, imprimeur écoresponsable français : « Désormais, nous réduisons dès le départ le matériel au moment de la conception. Les cartes sont en carton, avec un peu de plastique pour le vernis de revêtement, mais il existe aussi des vernis écologiques. On propose par exemple d’utiliser le portable en tant que chronomètre plutôt que d’inclure un sablier. Idem pour les bases ferreuses, de type magnets, qui ne se recyclent pas : on préfère proposer d’autres solutions, comme l’électrostatique.
Production responsable du jeu de sensibilisation et gestion des déchets
Choisir un imprimeur écoresponsable
Concernant l’impression, mieux vaut se tourner vers un imprimeur qui saura choisir un papier recyclé issu de forêts durables ainsi que des encres écologiques (végétales ou à base d’eau).
Minimiser les déchets durant la production est aussi essentiel. Par exemple, les chutes de carton peuvent être réutilisées pour d’autres composants ou pour l’emballage, contribuant à une économie circulaire.
Sur l’aspect production, Julien Griffon précise que « l’idéal, ce sont des machines à très faible consommation énergétique, durables dans le temps, réparables, recyclables, reconditionnables. »
Pour faire imprimer le jeu de société écolo Graines d’Espoir, notre choix s’est porté sur l’imprimeur tricolore Ecossentials avec lequel nous partageons des valeurs communes ! Retrouvez d’ailleurs le détail de l’approche d’Essentials dans cet article sur l’impression de jeux de société écoresponsable.
Réfléchir au lieu de fabrication du jeu d’entreprise
En plus du choix des matériaux, le lieu de fabrication joue un rôle crucial dans l’empreinte carbone d’un jeu de société. Sur ce point, Graines d’espoir est exemplaire, avec une fabrication en France pour une distribution sur le marché français. Car fabriquer localement (ou au plus près des consommateurs finaux) permet en effet de réduire les émissions liées au transport. « En termes de production, un éditeur qui veut faire dans l’écologie essaiera de se rapprocher le plus possible du lieu de distribution », explique Julien Griffon, qui ajoute : « C’est en Pologne, République tchèque et Roumanie que l’on fabrique le plus de jeux de société, suivi ensuite par l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et les Pays-Bas. Je connais d’ailleurs une usine en Pologne qui s’appelle Fabryka Kart : ils ont installé des panneaux solaires et instauré un process de sourcing écologique et de recyclage des déchets ».
Ajuster la taille de la série aux besoins du marché
Il est essentiel d’ajuster la taille des séries aux besoins réels du marché pour éviter le gaspillage. Plutôt que de produire des boîtes de jeux en masse pour bénéficier de réductions de coûts unitaires, une approche plus raisonnée et durable consiste à limiter la production à ce qui sera réellement vendu. « Il y a une aberration écologique à produire des jeux en masse pour avoir des prix réduits et ensuite jeter les invendus ! Je privilégie plutôt l’achat maîtrisé en travaillant sur des petites séries plutôt que de vouloir faire une économie d’échelle à tout prix », commente le dirigeant d’Essentials.
D’ailleurs, le jeu français Graines d’Espoir va être produit en reflet à “la demande” à travers cette campagne Ulule. Ce n’est pas directement relié au nombre de personnes intéressées, mais cela offre une sorte de proportionnalité, avec un système de nombre d’impressions par paliers de financement.
Emballage du jeu RSE et logistique raisonnés
Emballage minimaliste pour limiter l’impact sur l’environnement
L’emballage d’un jeu de société doit être réduit jusqu’à son strict minimum et fabriqué à partir de matériaux recyclables. Un emballage minimaliste réduit non seulement l’empreinte écologique, mais est aussi mieux perçu par les consommateurs. D’ailleurs, 86% des consommateurs interrogés déclarent réduire l’utilisation d’emballages plastique et 72% sont favorables à une taxe sur les emballages non recyclables (étude Consom’Action, 2024).
« Quand on filme une boîte de jeu, le film plastique est jeté ; on ne peut pas le recycler », explique Joeffrey Costa. « Le suremballage aussi est à éviter. Pour remplacer le plastique, on peut simplement ne pas sceller et, à la place, mettre deux pastilles adhésives qui empêchent d’ouvrir la boîte. Si l’on doit vraiment utiliser du plastique, je préconise du plastique recyclable, biosourcé, à base d’amidon. »
Distribution responsable du jeu de responsabilité sociétale des entreprises
La distribution est une étape à laquelle l’empreinte carbone peut rapidement monter en flèche, notamment à cause du transport. En effet, si un jeu de société – même écoconçu et présentant peu d’emballages – est vendu à l’autre bout du monde, la dimension RSE s’en voit fortement impactée. L’objectif est donc de privilégier des solutions logistiques à faible émission de carbone, comme le transport par train, et de limiter la zone de distribution à un rayon proche du lieu de production.
Comment produire un jeu de société d'entreprise RSE, en conclusion ?
Produire un jeu de société RSE est un processus complexe, mais
gratifiant, qui permet de répondre aux attentes des consommateurs tout en contribuant à un avenir plus durable. En intégrant la responsabilité sociétale des entreprises à chaque étape, de la conception à la distribution, nous avons réussi notre pari pour le jeu pédagogique et de sensibilisation Graines d’Espoir, de faire non seulement un produit attractif, mais aussi un impact positif sur la société et l’environnement. Enfin, gardons à l’esprit que « 1000 nouveaux jeux sortent chaque année en France alors qu’ils sont rarement utilisés plus de 4 ou 5 fois ! Il faut donc repenser le modèle, en dynamisant le marché de l’occasion, le partage, le don », conclut Julien Griffon.